Moulin ayant un droit fondé en titre : reconnaissance de puissance après expertise judiciaire (TA Bordeaux, 1er février 2018- jurisprudence cabinet)

Angles-sur-l'Anglin2Par Me Fanny Angevin- GREEN LAW AVOCATS

Par un jugement en date du 1er février 2018 (jurisprudence cabinet), le Tribunal administratif de Bordeaux a donné raison à un exploitant d’un moulin et a reconnu après une expertise judiciaire une puissance de 628 kW au moulin fondé en titre, équipé d’une micro-centrale hydroélectrique, situé en région Nouvelle Aquitaine.

Dans cette affaire, le propriétaire du moulin s’était vu refuser une demande de reconnaissance de la puissance fondée en titre de son moulin à hauteur de 409 kW. Il avait dès lors contesté le refus de l’administration de reconnaître cette puissance.

Par un jugement avant dire droit, le Tribunal administratif de Bordeaux a d’abord ordonné que soit menée une expertise en vue de déterminer la consistance du droit fondé en titre du moulin. Cette expertise a évalué la consistance légale attachée au moulin du requérant à 628 kW.

Au vu des conclusions du rapport d’expertise, le Tribunal administratif rappelle tout d’abord que la détermination de la puissance fondée en titre s’opère au regard de la hauteur de la chute d’eau et du débit du cours d’eau ou du canal d’amenée et que ce débit doit être apprécié au niveau du vannage d’entée, en aval de ce canal.

Puis le Tribunal souligne ensuite que la consistance légale d’un droit fondé en titre s’apprécie selon la puissance maximale dont il peut en théorie disposer et non pas en fonction de la force utile de l’ouvrage : « Considérant qu’un droit fondé en titre conserve la consistance qui était la sienne à l’origine ; qu’à défaut de preuve contraire, cette consistance est présumée conforme à sa consistance actuelle ; que celle-ci correspond, non à la force motrice utile que l’exploitant retire de son installation, compte tenu de l’efficacité plus ou moins grande de ses équipements, mais à la puissance maximale dont il peut en théorie disposer ; que dans le cas où des modifications de l’ouvrage auquel ce droit est attaché ont pour effet d’accroître la force motrice théoriquement disponible, appréciée au regard de la hauteur de la chute d’eau et du débit du cours d’eau ou du canal d’amenée, ces transformations n’ont pas pour conséquence de faire disparaître le droit fondé en titre, mais seulement de soumettre l’installation au droit commun de l’autorisation ou de la concession pour la partie de la force motrice supérieure à la puissance fondée en titre » (voir sur ce point les conclusions éclairantes de M. Xavier de Lesquen dans l’affaire CE, 16 décembre 2016, n°393293).

L’administration contestait pourtant les apports du rapport d’expertise et produisait au soutien de ses affirmations une étude critique de l’IRSTEA (Institut national de recherche en science et technologies pour l’environnement et l’agriculture), réalisée postérieurement aux opérations d’expertise. A ce sujet, le Tribunal administratif de Bordeaux a estimé que cette étude ne présentait pas de caractère contradictoire et que les moyens soulevés dans l’étude ne permettaient pas de remettre en cause les estimations réalisées par l’expert dans son rapport.

 

Le Tribunal administratif de Bordeaux a donc fixé la consistance légale du moulin fondé en titre à hauteur de 628 kW.

 

Cette décision est particulièrement intéressante pour les propriétaires de moulins fondés en titre.

Bien qu’une expertise ait eu lieu et eu pour effet de rallonger la procédure, ce jugement démontre une méthodologie précise de la juridiction quant aux modalités de calcul de la consistance légale et reste un signe positif pour les propriétaires de moulins cherchant à faire reconnaître la puissance de leur ouvrage.

Il souligne la nécessité d’inscrire les démarches administratives dans un cadre non seulement juridique strict, mais plus encore d’appuyer les critères juridiques de démonstrations techniques.