Zones prioritaires pour la biodiversité : le décret est paru au JO

Path in a sunny summer forest

Par Fanny ANGEVIN- Green law avocats

Le décret n°2017-176 du 13 février 2017 relatif aux zones prioritaires pour la biodiversité est paru au JO du 15 février dernier.

Rappelons-nous que le projet de décret était en consultation jusqu’au 18 novembre 2016 (voir l’article sur ce blog).

Le texte définitif est pris en application du II de l’article L. 411-2 du code de l’environnement qui a été introduit par l’article 74 de loi n°2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et qui prévoit :

« Un décret en Conseil d’Etat détermine également les conditions dans lesquelles, lorsque l’évolution des habitats d’une espèce protégée au titre de l’article L. 411-1 est de nature à compromettre le maintien dans un état de conservation favorable d’une population de cette espèce, l’autorité administrative peut :

Délimiter des zones où il est nécessaire de maintenir ou de restaurer ces habitats ;

Etablir, selon la procédure prévue à l’article L. 114-1 du code rural et de la pêche maritime, un programme d’actions visant à restaurer, à préserver, à gérer et à mettre en valeur de façon durable les zones définies au 1° du présent II ;

3° Décider, à l’expiration d’un délai qui peut être réduit compte tenu des résultats de la mise en œuvre du programme mentionné au 2° au regard des objectifs fixés, de rendre obligatoires certaines pratiques agricoles favorables à l’espèce considérée ou à ses habitats. Ces pratiques peuvent bénéficier d’aides lorsqu’elles induisent des surcoûts ou des pertes de revenus lors de leur mise en œuvre. »

Le décret vient dont déterminer les conditions dans lesquelles le Préfet a la possibilité de mettre en place des « zones prioritaire pour la biodiversité » (ZPB), lorsque l’évolution des habitats d’une espèce protégée est de nature à compromettre le maintien dans un état de conservation favorable d’une population de cette espèce.

Il convient de noter que le décret n°2017-176 a majoritairement repris les dispositions présentes dans le projet de décret, à l’exception de la définition des zones prioritaires pour la biodiversité, ce qui paraît logique étant donné que cette définition reprenait pour l’essentiel les termes de l’article L. 411-1 du code de l’environnement.

En premier lieu, le décret prévoit les modalités de délimitation des zones. En effet, le décret fait valoir que les zones prioritaires pour la biodiversité sont délimitées par arrêté du préfet, qui doit être pris après avis :

  • la commission départementale de la nature, des paysages et des sites ;
  • du conseil scientifique régional du patrimoine naturel ;
  • de la chambre départementale d’agriculture ;
  • du commandant de la zone terre compétent lorsque ces zones comportent des emprises relevant du ministère de la défense.

Le décret précise que les avis sont réputés rendus s’ils n’interviennent pas dans un délai de deux mois à compter de la transmission du projet.

Surtout, ce ne sont que des avis simples, qui ne lient pas le Préfet. Ce sont cependant des indices qui pourront, dans un sens ou dans un autre, conduire à modifier le périmètre de la zone.

En deuxième lieu, le décret prévoit également un programme d’actions pour chaque zone prioritaire pour la biodiversité.

A ce titre, le décret précise que le projet de programme d’actions est élaboré par le préfet en concertation avec les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi qu’avec les représentants des propriétaires et exploitants des terrains concernés. Il est ensuite arrêté par le préfet après la mise en œuvre d’une procédure de consultation.

Là encore, le caractère consultatif de la procédure ne liera pas le Préfet. La concertation avec les propriétaires et/ou exploitants restera cependant une étape importante pour faire valoir certains arguments.

Le programme arrêté définit en effet les actions que les propriétaires et exploitants sont incités à mettre en œuvre au titre des pratiques agricoles, en rapport avec l’espèce pour laquelle la zone est délimitée.

Les actions précitées sont les suivantes :

  • Maintien d’une couverture végétale du sol, permanente ou temporaire ;
  • Travail du sol, gestion des résidus de culture, apports de matière organique ;
  • Gestion des intrants, notamment des fertilisants, des produits phytosanitaires et de l’eau d’irrigation ;
  • Diversification des cultures par assolement et rotations culturales ;
  • Maintien ou création de haies ou d’autres éléments du paysage, de fossés d’infiltration et aménagements ralentissant ou déviant l’écoulement des eaux ;
  • Restauration ou entretien d’un couvert végétal spécifique ;
  • Restauration ou entretien de mares, plans d’eau ou zones humides.

Le programme détermine également les objectifs à atteindre pour chaque action. A ce titre le décret précise que les objectifs doivent si possible être quantifiés et assortis de délais.

Par ailleurs, le programme présente les moyens prévus afin d’atteindre ces objectifs. Il expose les effets escomptés sur le milieu et précise les indicateurs quantitatifs qui permettront de les évaluer. En outre, le programme rappelle les autres mesures qui sont prises au titre du code de l’environnement visant la protection de l’espèce pour laquelle la zone est délimitée. Il est également indiqué que le contenu du programme peut être précisé par arrêté.

En troisième et dernier lieu, le décret prévoit des obligations nouvelles pour les agriculteurs. En effet, en fonction des résultats de la mise en œuvre du programme d’actions, le préfet pourra rendre obligatoires certaines actions en matière de pratiques agricoles, à l’expiration d’un certain délai. La décision du préfet doit être cependant prise seulement après la mise en œuvre d’une procédure de consultation. Elle doit également avoir été affichée et notifiée aux propriétaires et exploitants concernés.

Enfin, il est important de noter que le décret prévoit qu’en cas de non-respect par le propriétaire ou l’exploitant d’un terrain, de l’une des actions du programme d’action rendues obligatoires, une amende de cinquième classe peut être infligée.

Si le caractère dissuasif de cette peine peut poser question, c’est surtout les effets concrets que de telles zones de protection de biodiversité vont avoir sur les activités actuelles et venir de certaines parcelles qui devront être scrutées.