Panneau de danger temporaire glissement de terrain (détouré)La Cour administrative d’appel de Bordeaux (formation des chambres réunies, du 17 novembre 2014, n°12BX01795) vient de rendre une intéressante décision en matière d’indemnisation du fait d’un dommage de travaux publics.

Le 19 avril 2000, à la suite d’une période de précipitations intenses, un glissement de terrain sur les pentes du Mont Cabassou, dans la commune de Rémire-Montjoly (Guyane), a provoqué une importante coulée de boue. Cette coulée de boue a, en partie, enseveli l’usine de fabrication de yaourts, glaces et jus de fruits appartenant à la société Cilama, située en contrebas de la RN 3, à la base du Mont Cabassou.

Les assureurs de la Cilama lui ont versé plus de douze millions d’euros en réparation des dommages aux biens subis lors du glissement de terrain et des pertes d’exploitation. Ils ont ensuite saisi le tribunal administratif de Cayenne pour demander la condamnation de l’État à réparer leur préjudice.

Par un jugement du 9 juin 2008, le tribunal administratif de Cayenne a déclaré l’Etat entièrement responsable des dommages et l’a condamné à rembourser intégralement les assureurs. L’État a alors interjeté appel.

La cour administrative d’appel de Bordeaux a alors déclaré l’Etat responsable d’un tiers des dommages subis par la société Cilama, a rejeté les conclusions de l’Etat tendant à ce que la commune de Rémire-Montjoly le garantisse des condamnations prononcées contre lui et a prescrit une expertise en vue d’évaluer le montant exact du préjudice (Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, 19 janvier 2010, n°08BX02263).

A la suite d’un pourvoi de la société Cilama, le Conseil d’Etat a annulé cet arrêt pour insuffisance de motivation et renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel de Bordeaux (Conseil d’État, 29 juin 2012, n°337820).

L’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux rendu après renvoi du Conseil d’Etat est la décision présentement commentée (Cour administrative d’appel de Bordeaux, formation des chambres réunies, du 17 novembre 2014, n°12BX01795).

Cette décision mérite qu’on s’y intéresse en ce qu’elle rappelle dans quelles conditions la responsabilité de l’Etat peut être engagée en cas de carence du maire ou en présence de dommages causés à des tiers par des travaux publics.

Tout d’abord, la cour administrative d’appel de Bordeaux annule le jugement du tribunal administratif de Cayenne en ce qu’il avait retenu la responsabilité pour faute de l’Etat (I.) puis, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, admet la responsabilité sans faute de l’Etat pour les dommages de travaux publics causés à des tiers (II.).

  •  Sur le bien-fondé du jugement du tribunal administratif de Cayenne

Après avoir rappelé les dispositions du 5° de l’article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales et le 1° de l’article L.2215-1 du même code, la Cour considère « qu’il résulte de ces dispositions que la responsabilité de l’Etat en matière de prévention des accidents naturels ne peut être engagée qu’à la condition que le préfet, en s’abstenant de se substituer au maire pour prendre les mesures propres à prévenir de tels accidents, ait commis une faute lourde ».

Il est vrai qu’en principe, la prévention des accidents naturels relève de la compétence du maire. Néanmoins, en cas de carence du maire, le Préfet peut se substituer au maire de la Commune après une mise en demeure restée sans résultat.

Si toutefois le Préfet reste lui aussi inactif, la responsabilité de l’Etat ne peut alors être engagée qu’à la condition que le préfet, en s’abstenant de se substituer au maire, ait commis une faute lourde (Conseil d’Etat, 1ère et 2ème sous-sections réunies, 7 avril 1967, n°65187 65224, mentionné aux tables du recueil Lebon, Conseil d’État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 25 juillet 2007, n°283000, Conseil d’État, 4ème et 5ème sous-sections réunies, 25 juillet 2007, n°293882).

En l’espèce, le tribunal administratif s’est borné à retenir que l’insuffisance des mesures de prévision et de prévention prises par les services de l’équipement était constitutive d’une faute de nature à engager la responsabilité de l’Etat. Dès lors qu’il n’a pas caractérisé l’insuffisance des mesures de prévision et de prévention prises par les services de l’équipement de « faute lourde », le tribunal administratif a commis une erreur de droit justifiant l’annulation de son jugement.

C’est donc à bon droit que la cour administrative d’appel de Bordeaux annule le jugement du tribunal administratif de Cayenne.

  • Sur l’effet dévolutif de l’appel

 Dans un premier temps, la cour administrative d’appel de Bordeaux rappelle le principe de responsabilité sans faute de l’Etat du fait des dommages causés par des travaux publics à des tiers (2.1.). Puis, dans un second temps, elle écarte chacune des causes d’exonération susceptibles d’être invoquées (2.2.).

– Sur la responsabilité sans faute de l’Etat pour des dommages causés à des tiers par des travaux publics

 La cour administrative de Bordeaux rappelle le principe de responsabilité sans faute de l’Etat pour les dommages causés aux tiers par des travaux publics.

 Tout d’abord, elle explique « que le mouvement de terrain survenu le 19 avril 2000 a été provoqué par le soulèvement des couches géologiques supérieures du Mont Cabassou […] et que ce soulèvement résulte des fortes pressions provenant du gonflement, à la suite de pluies intenses, d’une nappe d’eau profonde et captive située dans le substratum granitique, fissuré dans sa partie supérieure ».

Puis, elle précise «  qu’à la suite de deux précédents glissements de terrain importants, survenus le 14 février 1989 et le 23 mai 1990, les services de l’équipement, chargés de l’entretien de la RN 3, ont notamment décidé, afin de prévenir la survenance de nouveaux mouvements de terrain ou tout au moins d’en limiter l’ampleur, de faire procéder à des prélèvements de matériaux dans la partie supérieure des zones touchées par ces deux glissements ».

Elle en déduit alors « qu’en réduisant l’épaisseur des couches géologiques supérieures dans la partie du Mont Cabassou exposée aux surpressions en provenance de la nappe captive et en diminuant ainsi le poids de ces couches dont la pression contrebalançait ces surpressions, ces travaux publics, à l’égard desquels les sociétés Cilama et Antilles Glaces ont la qualité de tiers, ont joué un rôle déterminant dans la survenance du glissement du 19 avril 2000 et, par suite, du dommage subi par ces sociétés ; qu’ils sont, dès lors, de nature à engager la responsabilité de l’Etat vis-à-vis des assureurs de celles-ci, subrogés dans leurs droits ».

Bien que l’administration ait poursuivi un but légitime en réalisant les travaux sur la RN3 («  prévenir la survenance de nouveaux mouvements de terrain ou tout au moins […] en limiter l’ampleur »), le « rôle déterminant » de ces travaux a engagé, en vertu d’un principe bien établi, sa responsabilité sans faute (voir pour des applications de ce principe : Conseil d’Etat, Section, 11 octobre 1968, n°69877, publié au recueil Lebon, Conseil d’Etat, Section, 23 décembre 1970, n°76976 76977, publié au recueil Lebon, Conseil d’Etat, 1ère et 4ème sous-sections réunies, 28 octobre 1977, n°00791 00870, publié au recueil Lebon ou, plus récemment, Conseil d’État, 3ème et 8ème sous-sections réunies, 7 août 2008, n°289329).

Cet arrêt rappelle également qu’il n’est nul besoin que les travaux publics soient la cause exclusive du dommage pour engager la responsabilité de l’Etat. Il suffit qu’ils aient eu un rôle déterminant.

C’est donc à bon droit que la Cour a retenu la responsabilité sans faute de l’État à l’égard de la Cilama. Néanmoins, il est possible de s’interroger sur la position de la Cour en ce qui concerne l’absence de cause d’exonération de la responsabilité de l’Etat.

 

 

– Sur l’absence de cause d’exonération

La cour administrative d’appel de Bordeaux examine chacune des causes d’exonération susceptible d’être invoquée : la faute d’un tiers (2.2.1.), la force majeure (2.2.2.) et la faute de la victime (2.2.3).

 Sur le caractère inopérant de la faute d’un tiers

 Aux termes de son arrêt, la cour administrative d’appel de Bordeaux estime que « la responsabilité de l’Etat étant engagée à l’égard des assureurs à raison de dommages causés par des travaux publics à des tiers, il ne peut s’exonérer de sa responsabilité que si ces dommages sont, au moins partiellement, imputables à une faute de la victime ou à un cas de force majeure ».

 Il s’agit là d’un rappel d’un principe encore une fois bien établi (voir notamment Conseil d’Etat, Section, 11 octobre 1968, n°69877 ou encore Conseil d’Etat, 1ère et 4ème sous-sections réunies, 28 octobre 1977, n°00791 00870, publié au recueil Lebon).

Elle en déduit que «  par suite, l’Etat ne peut utilement invoquer la faute de la commune de Rémire-Montjoly pour s’exonérer de sa responsabilité à l’égard des assureurs ». Une jurisprudence constante illustre cette solution (Conseil d’Etat, Assemblée, 9 janvier 1976, n°86053, publié au recueil Lebon ou encore Conseil d’Etat, Section, 26 mars 1965, 62589, publié au recueil Lebon).

 C’est donc à bon droit que le fait du tiers n’est pas retenu comme cause d’exonération.

Néanmoins, bien que l’État soit tenu responsable pour le tout envers la victime et qu’il ne puisse utilement invoquer le fait du tiers, la Cour aurait pu accepter que l’État appelle en garantie la commune. Toutefois, la Cour écarte cette possibilité par une motivation assez surprenante.

La Cour estime en effet que la commune ne pouvait pas prévoir les risques, que le maire n’a pas commis de faute dans l’exercice de ses pouvoirs de police et qu’il n’a pas non plus commis d’erreur manifeste d’appréciation en délivrant le permis de construire de la société CILAMA et qu’enfin, quand bien même il aurait délivré un permis de construire illégal à la société CILAMA, cette illégalité ne pouvait être regardée comme présentant un lien direct de causalité avec le dommage subi par la société du fait du glissement de terrain du 19 avril 2000.

A cet égard, il est surprenant de considérer que la délivrance d’un permis illégal dans une zone soumise à des glissements de terrain n’a pas été à l’origine du dommage… On peut également s’interroger sur le fait que la Cour considère que la commune ne pouvait pas prévoir le dommage alors que l’évènement n’était pas imprévisible pour l’État (cf.infra) et que tous deux faisaient des réunions de concert pour déterminer les risques de glissements de terrain sur le territoire de la commune…

Il se peut néanmoins que le juge ait adopté cette position au regard des erreurs commises par les services de l’État lorsqu’ils ont conseillé la commune. En effet, les services de l’Etat, chargés de l’instruction de la demande de permis, ont émis un avis favorable au projet d’implantation de l’usine de la société Cilama sur le terrain et le maire avait en outre demandé au préfet de la Guyane de délimiter des périmètres d’exposition aux risques.

Le juge aurait donc choisi de condamner l’État en tant que personne publique la plus compétente pour se prononcer sur les risques de glissements de terrain. Vue sous cet angle, cette position est parfaitement compréhensible.

Sur l’absence de force majeure

La Cour ne retient pas la force majeure comme cause d’exonération.

En effet, elle considère que : « compte tenu de la survenance de nombreux glissements de terrain déjà constatés sur le versant nord du Mont Cabassou, notamment des deux précédents de grande ampleur observés en 1989 et 1990, le glissement à l’origine du dommage ne peut être regardé, alors même qu’il faisait suite à des précipitations d’une particulière intensité, comme ayant revêtu un caractère d’imprévisibilité constitutif d’un cas de force majeure susceptible d’exonérer l’Etat de sa responsabilité ».

Cette motivation est très contestable. En effet, d’une part, les précipitations paraissaient être d’une particulière intensité. D’autre part, il semblerait que c’était la première fois que des glissements de terrain avaient une telle ampleur sur les versants du Mont Cabassou. La RN3 n’aurait, par exemple, jamais été franchie auparavant.

Ce type d’évènement, dans sa nature, a donc été vu comme prévisible, mais ce sont ses caractéristiques et son ampleur qui auraient pu se voir qualifiée de force majeure.

Certes, la jurisprudence est assez aléatoire en ce qui concerne l’appréciation de la force majeure et du caractère prévisible de l’évènement (Voir en ce sens René Chapus, Droit administratif général, Tome 1, 15e éd. Broché, 2001, p.1249).

Cependant, la Cour considère que tant pour la société Cilama que pour la commune de Rémire-Montjoly, l’ampleur du glissement de terrain était imprévisible, celles-ci ne disposant pas d’informations leur permettant de penser que les terrains situés en contrebas de la RN 3, tels que celui occupé par la société Cilama, étaient susceptibles d’être atteints par un nouveau glissement. On comprend donc mal pourquoi l’État aurait pu, quant à lui, prévoir le glissement de terrain.

Il est donc étonnant que le caractère imprévisible de l’évènement n’ait pas été accepté par la Cour.

En outre, une solution de compromis aurait pu être envisagée en admettant l’existence d’un évènement de force majeure qui aurait contribué, avec le comportement de l’État (le rôle déterminant des travaux publics), à la réalisation du dommage. La responsabilité de l’État n’aurait alors été engagée que dans la mesure où son fait a causé le dommage. Ce système d’ « effet exonératoire partiel » de la force majeure est admis aussi bien dans les régimes de responsabilité avec faute que de responsabilité sans faute. Il est particulièrement pertinent lorsque les conséquences dommageables d’un évènement de force majeure ont été aggravées par le fait du défendeur ou par un ouvrage public, en l’espèce, l’État. (Conseil d’Etat, 2ème et 4ème sous-sections réunies, 13 mai 1970, n°77122, mentionné aux tables du recueil Lebon ou encore Conseil d’Etat, 2ème et 6ème sous-sections réunies,25 mai 1990, n°39460 39497, mentionné aux tables du recueil Lebon).

En l’espèce, il ressort de l’arrêt que les pluies ont été d’une particulière gravité et que la nappe captive s’est, par suite, beaucoup gonflée. L’évènement de force majeure aurait pu résider dans ces pluies exceptionnelles et dans le glissement de terrain qui en a résulté. Il ressort également de l’arrêt que le glissement de terrain a été aggravé par les travaux publics qui ont joué un rôle déterminant (mais pas exclusif) dans la survenance du glissement de terrain du 19 avril 2000.

Par conséquent, la cour administrative d’appel de Bordeaux aurait éventuellement pu admettre un effet exonératoire partiel de la force majeure.

Sur l’absence de faute de la victime

La Cour écarte ensuite la faute de la société Cilama comme cause d’exonération.

L’État faisait valoir que la société Cilama ne pouvait ignorer l’important glissement de terrain survenu le 14 février 1989, qui avait atteint la RN 3, lorsqu’elle a sollicité le 29 janvier 1990 le transfert d’un permis de construire puis, en mars 1990, la délivrance d’un permis en vue d’implanter son usine sur une parcelle située non loin de cette route, et qu’elle ne pouvait non plus ignorer qu’un nouveau glissement était intervenu le 23 mai 1990 alors qu’elle n’avait pas encore obtenu le permis de construire, qui a été délivré par le maire de Rémire-Montjoly le 1er août 1990.

Toutefois, la Cour a considéré qu’ « il ne résulte pas de l’instruction qu’elle ait pu disposer d’informations lui permettant de penser que le terrain sur lequel elle envisageait d’implanter son usine, lequel n’avait jamais été atteint par un glissement de terrain avant la catastrophe du 19 avril 2000, était exposé à un tel risque ; qu’en particulier, ce terrain n’était classé par aucun document applicable dans une zone exposée à un risque naturel ; que les services de l’Etat, chargés de l’instruction de la demande de permis, ont émis un avis favorable au projet d’implantation de cette usine sur ce terrain ; que le permis a été délivré par le maire sans aucune prescription particulière en matière de risques naturels ; que, par suite, la société Cilama n’a pas commis de faute d’imprudence de nature à atténuer la responsabilité de l’Etat ».

Elle ajoute ensuite que : « le permis de construire du 1er août 1990 autorisait l’implantation d’une usine en zone NC du plan d’occupation des sols alors qu’y étaient interdits, dans un but de protection de la valeur agricole des terres,  » les établissements industriels et les dépôts, sauf ceux liés aux exploitations agricoles  » ; que la société Cilama, qui ne pouvait regarder son usine comme liée à des exploitations agricoles, ne pouvait ignorer l’illégalité dont était entaché le permis qui lui a été délivré ; que, toutefois, le dommage qu’elle a subi du fait de la catastrophe du 19 avril 2000 ne peut être regardé comme découlant directement de la situation irrégulière dans laquelle elle s’est ainsi elle-même placée ».

Tout comme pour le rejet de l’appel en garantie de la commune, la position de la Cour est ici pour le moins étonnante. En effet, comment la société Cilama pouvait-elle ignorer le caractère prévisible du dommage malgré les glissements de terrain répétés sur le Mont Cabassou alors que l’État aurait dû le prévoir ? De même, il est, une fois encore, surprenant de considérer que la délivrance d’un permis de construire que la société Cilama savait illégal dans une zone soumise à des glissements de terrain n’a pas été au moins en partie à l’origine du dommage…

Ici encore, la Cour aurait pu être moins stricte dans son appréciation de la faute de la victime et considérer que la société Cilama avait commis une faute. Celle-ci aurait alors pu, avec le fait de l’État, concourir au dommage et exonérer partiellement ce dernier de sa responsabilité.

Cette position de la Cour en ce qui concerne l’absence de faute de la victime s’explique peut-être pour garder une cohérence avec la position qu’elle adopte en ce qui concerne l’appel en garantie de la commune de Rémire-Montjoly. Elle s’explique aussi peut-être en raison des insuffisances dont les services de l’État ont fait preuve.

 

 

En conclusion, la cour administrative d’appel de Bordeaux applique de façon très classique les principes de responsabilité de l’État pour carence puis sans faute. Ainsi, elle écarte sa responsabilité pour faute dans un premier temps puis engage sa responsabilité sans faute dans un second temps.

 

Elle adopte aussi une conception très stricte des causes d’exonération, ce qui semble assez critiquable au regard des circonstances de l’espèce et de la jurisprudence existante.

 

En conséquence, il est possible de supposer qu’elle a voulu par cet arrêt alerter l’État sur les conséquences de ses actes lorsque ses services ne sont pas suffisamment vigilants sur les problématiques de risques naturels et d’instruction des permis de construire, dans un contexte où le procès du maire de la Faute-sur-Mer après la tempête Xynthia était en délibéré…

 

Marie-Coline Giorno

Green Law Avocat