Urbanisme: Attention à l’entrée en vigueur de la réforme du contentieux de l’urbanisme (Décret n° 2018-617 du 17 juillet 2018)

attentionPar Me Lou DELDIQUE – Avocat of counsel – lou.deldique@green-law-avocat.fr

En juillet dernier, le Gouvernement a adopté un nouveau décret modifiant substantiellement le contentieux administratif en général et le contentieux de l’urbanisme en particulier (décret n° 2018-617 du 17 juillet 2018, consultable ici).

Ce texte, qui fait suite au rapport Maugüé sur le contentieux des autorisations d’urbanisme de janvier 2018 (consultable ici) est entré en vigueur le 1er octobre 2018.

Retour sur ses principaux apports.

  • Nouvelle incidence du référé suspension :

Pour toutes les requêtes enregistrées devant les juridictions administratives à partir du 1er octobre 2018, le requérant qui a perdu un référé suspension pour défaut de moyen sérieux devra, dans un délai d’un mois à compter de la notification de l’ordonnance, confirmer le maintien de sa requête. À défaut, il sera réputé s’en désister.

 

  • Suppression du degré d’appel pour certains litiges :

La suppression du degré d’appel pour le contentieux relatif à certaines autorisations d’urbanisme dans les communes soumises à la taxe sur les logements vacants, soit dans les zones marquées par un déséquilibre entre l’offre et la demande de logements (voir notre analyse ici), est prolongée jusqu’au 31 décembre 2022.

  • Nouveau champ d’application pour le R.600-1 :

Le décret généralise l’obligation de notifier les recours au titre de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme (qui ne concernait jusqu’ici que les certificats ou les autorisations d’urbanisme) à l’ensemble des « décisions relatives à l’occupation ou l’utilisation du sol régie par le [code de l’urbanisme] ». Notons que cette nouvelle règle risque d’être source de nombreuses difficultés d’interprétation, car sa rédaction semble particulièrement générale : même si le texte garde la référence au « titulaire de l’autorisation », il semble notamment plus prudent de notifier à l’administration les recours introduits contre des refus d’autorisation.

  • Intérêt à agir :

La démonstration de l’intérêt à agir du requérant qui conteste une décision relative à l’occupation ou l’utilisation du sol doit se faire ab initio en produisant d’emblée le titre de propriété ou les statuts s’il s’agit d’une association (article R. 600-4 CU).

  • Cristallisation automatique des moyens :

Le mécanisme de cristallisation des moyens est renforcé lorsque le recours porte sur une décision d’urbanisme : désormais, les parties ne pourront plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication du premier mémoire en défense (article R.600-5 CU).

  • Délai de jugement :

Les juridictions du fond devront dorénavant juger les dossiers dans un délai de 10 mois lorsque le litige concerne un permis de construire un bâtiment comportant plus de deux logements ou un permis d’aménager un lotissement (article R.600-6 CU). On ne peut bien évidemment que se demander comment les juridictions administratives (qui sont déjà surchargées) pourront tenir de tels délais …

  • Diminution du délai de recours contre les constructions achevées :

Le délai dans lequel il est possible de demander l’annulation d’un permis de construire lorsque celui-ci n’a pas été affiché et que la construction est achevée passe d’1 an à 6 mois (article R.600-3 CU).

Enfin, deux mesures présentant un lien plus ténu avec le contentieux de l’urbanisme sont prévues :

  • Il sera désormais possible de se faire délivrer un certificat de non-recours par les juridictions administratives. Dans les faits, il était déjà possible de demander un tel certificat, mais dans la mesure où aucun texte ne les y contraignait, certaines juridictions refusaient de le faire ;
  • Le permis ou la décision de non-opposition à déclaration préalable mentionnera la date d’affichage en mairie de la demande d’autorisation. Cette mesure simplifiera l’affichage pour le pétitionnaire (voir notre article ici).

 

Rappelons enfin que toutes ces mesures n’entrent pas en vigueur en même temps :

  • Les dispositions relatives au certificat de non recours et aux mentions figurant sur la décision d’autorisation sont entrées en vigueur le 1er octobre 2018 ;
  • Celles des articles R. 600-1, R. 600-3 et R. 600-4 du code de l’urbanisme sont applicables aux requêtes dirigées contre des décisions intervenues après le 1er octobre 2018 ;
  • Les nouveaux articles R. 600-5 et R. 600-6 du code de l’urbanisme sont applicables aux requêtes enregistrées à compter du 1er octobre 2018.