Suspension des « Jardins de Méditerranée » pour défaut d’évaluation environnementale

Par Amélie GILLE (Juriste chez Green Law Avocats) et Maître David DEHARBE (Avocat associé)

Le département de l’Hérault a tenté le saucissonnage d’un de ses projets, mais s’est fait rattraper par l’évaluation environnementale.

Par une décision n°447898 du 25 mai 2022 (consultable sur Doctrine et téléchargeable ci-dessous), le Conseil d’Etat a suspendu l’exécution de la décision de non-opposition du Préfet de l’Hérault à la déclaration IOTA du projet « Jardins de Méditerranée ».

En l’espèce, le département de l’Hérault avait déposé une déclaration au titre de la rubrique 2.1.5.0. de la nomenclature relative à la loi sur l’eau (article R.214-1 du code de l’environnement).

Le 24 août 2020, une décision de non-opposition à cette déclaration est née.

Sur le fondement des dispositions relatives au référé « étude d’impact » et au référé suspension (articles L.122-2 du code de l’environnement et L.521-1 du code de justice administrative), l’association France Nature Environnement demandait au juge des référés du Tribunal administratif de Montpellier de suspendre l’exécution de cette décision.

Par une ordonnance du 30 novembre 2020, le juge des référés a rejeté cette demande. Il a considéré qu’au regard des caractéristiques du projet et de ses conséquences sur les milieux, il n’était pas nécessaire de réaliser une évaluation environnementale préalable.

Rappelons que le projet « Jardins de Méditerranée » consiste en la création de jardins ayant vocation à accueillir 300 000 visiteurs par an, disposant de diverse structures (un aquarium, une géode, un restaurant, des bâtiments administratifs etc…) sur un terrain d’assiette de 19.31 hectares.

Le Conseil d’Etat, saisi d’un pourvoi de l’association France Nature Environnement n’a pas suivi ce raisonnement. Il a considéré que l’ordonnance était insuffisamment motivée en ce que le juge n’a pas recherché si la dimension du terrain d’assiette du projet, eu égard à sa nature, excédait le seuil prévu à la rubrique 39 b) de l’annexe à l’article R.122-2 du code de l’environnement (cette rubrique soumet à évaluation environnementale systématique les opérations d’aménagement dont le terrain d’assiette est supérieur ou égal à 10 hectares).

Statuant sur la demande de suspension, le Conseil d’Etat juge que le projet doit être regardé comme une opération d’aménagement dont le terrain d’assiette est supérieur ou égal à 10 hectares. En conséquence, en application de la rubrique 39 b) de l’annexe de l’article R.122-2 du code de l’environnement, le projet était soumis à une évaluation environnementale.

Fait intéressant, le juge rejette l’argumentaire relatif au découpage de l’opération : « la circonstance alléguée que ce projet soit susceptible de donner lieu ultérieurement à un permis d’aménager de moins de 5 hectares et à différents permis de construire étant sans incidence sur la qualification de cette opération ».

En l’absence d’évaluation environnementale, le Conseil d’Etat décide de suspendre l’exécution de la décision du Préfet de l’Hérault sur le fondement des dispositions de l’article L.122-2 du code de l’environnement.

Il semble donc que le référé « étude d’impact » permette selon le Conseil d’Etat, via la notion de projet, d’éviter les tentatives de séquençage des projets en redonnant à l’évaluation environnementale son importance.