Nouvelle réglementation pour la gestion des huiles usagées au 1er janvier 2022

Par Yann BORREL, avocat associé, Green Law Avocats (yann.borrel@green-law-avocat.fr)

On se souvient que la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (cf. art. 62, C. env., art. L. 541-10-1-17° nouveau) avait prévu la mise en place d’une filière à responsabilité élargie du producteur (REP) pour les producteurs d’huiles minérales ou synthétiques, lubrifiantes ou industrielles, à compter du 1er janvier 2022.

C’est désormais chose faite avec l’entrée en vigueur, à compter du 1er janvier 2022, d’une part, de la plupart des dispositions du décret n° 2021-1395 du 27 octobre 2021 (JORF n°0253 du 29 octobre 2021) et, d’autre part, de l’arrêté ministériel du même jour (JORF n°0264 du 13 novembre 2021) qui a défini le cahier des charges des éco-organismes devant collecter sans frais les huiles usagées auprès de leurs détenteurs (principalement les garagistes, les industriels, les transporteurs, les agriculteurs, les déchèteries…) et assurer leur régénération ou une autre opération de recyclage.

Mais il convient de rappeler que le décret du 27 octobre 2021 n’a pas seulement défini les conditions de mise en œuvre de l’obligation de REP applicable aux producteurs pour assurer la gestion des huiles usagées issues de la mise sur le marché national de leurs produits.

En effet, outre des définitions bienvenues sur des notions aussi essentielles que celles de « producteur », de « collecteur » ou encore de « collecteur-regroupeur » d’huiles usagées, le décret énonce des règles de gestion des huiles usagées qui sont des déchets dangereux en matière de collecte et de traitement. 

En synthèse, ces règles, qui déclinent la législation « cadre » en matière de gestion des déchets dans le domaine des huiles usagées, sont les suivantes :

– interdiction des mélanges :

–      Les huiles usagées dotées de caractéristiques différentes doivent être collectées séparément les unes des autres ainsi que des autres déchets ou substances qui empêchent leur régénération (cf. C. env., art. R. 543-4, alinéa 1er, nouveau) ;

–      Les huiles usagées ne doivent pas être mélangées avec d’autres déchets ou substances aux propriétés différentes y compris avec des huiles usagées dotées de caractéristiques différentes si un tel mélange empêche leur régénération ou une autre opération de recyclage fournissant des résultats d’ensemble sur le plan environnemental au moins équivalents à ceux de la régénération (cf. C. env., art. R. 543-4, alinéa 1er, nouveau) ;

– obligation de traçabilité :

Toute collecte d’huiles usagées doit faire l’objet d’un bon d’enlèvement par la personne réalisant sa collecte qui le remet au détenteur de ces huiles. Ce bon d’enlèvement doit notamment indiquer la quantité et la qualité des huiles usagées collectées (cf. C. env., art. R. 543-5-I). Il est prévu qu’un arrêté du ministre chargé de l’environnement puisse préciser les modalités d’application de cette obligation.

Enfin, afin d’assurer la traçabilité des huiles usagées les collecteurs et les collecteurs-regroupeurs qui réaliseront des opérations de gestion, au sens de l’article L. 541-1-1 du code de l’environnement, des huiles usagées devront être enregistrés auprès des éco-organismes ou des systèmes individuels (cf. C. env., art. R. 543-6). Cette obligation n’entrera toutefois en vigueur qu’à compter du 1er juillet 2022.

– obligation d’échantillonnage :

Sur toute collecte d’huiles usagées, le collecteur-regroupeur doit procéder contradictoirement au prélèvement de deux échantillons représentatifs avant tout mélange des huiles collectées. L’un de ces échantillons doit être conservé par le collecteur-regroupeur, l’autre doit être conservé, selon le cas, soit par le détenteur des huiles usagées, soit par leur collecteur jusqu’au traitement final du lot d’huiles usagées. Ces échantillons doivent porter le numéro du bon d’enlèvement (cf. C. env., art. R. 543-5-II). Il est également prévu qu’un arrêté du ministre chargé de l’environnement puisse préciser les modalités d’application de cette obligation.

– soumission des opérations de manipulation des huiles a la législation des I.C.P.E:

Cette obligation vaut sans doute à titre de simple rappel : le décret prévoit que toute opération de tri, de transit ou de regroupement de lots d’huiles usagées, ainsi que de traitement, doit être dans une installation classée pour la protection de l’environnement (I.C.P.E) dans toute autre installation réalisant ces opérations qui est située dans un autre Etat membre de l’Union européenne ou dans un Etat tiers, dès lors que cette installation respecte des dispositions équivalentes à celles de la législation des I.C.P.E et à la législation des déchets (cf. C. env., art. R. 543-5-III).

Reste à savoir comment cet aggiornamento de la réglementation relative à la gestion des huiles usagées sera accueillie par les acteurs de la filière.