ecoUn nouvel arrêté tarifaire applicable aux éoliennes terrestres vient d’être publié (arrêté ministériel tarifaire du 17 juin 2014).

Analyse.

C’est une nouvelle étape pour la filière éolienne à la suite de l’arrêt du 28 mai 2014 par lequel le Conseil d’Etat a annulé le précédent arrêté tarifaire du 17 novembre 2008 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent au motif que cet arrêté institue une aide d’Etat qui aurait dû être notifiée à la Commission européenne.

Le Conseil d’Etat avait été saisi d’un recours en excès de pouvoir le 6 février 2009 par l’association « vent de colère ». Au cours de la procédure, les juges du Palais Royal avaient saisi la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) d’une question préjudicielle afin de savoir si le dispositif devait être considéré comme une intervention financée au moyen de ressources de l’Etat, ce qui constitue l’un des critères de qualifications d’une aide d’Etat. La CJUE a conclu que le dispositif de soutien à l’éolien mis en place par l’arrêté du 17 novembre 2008 constituait une intervention au moyen de ressources de l’Etat.

Afin d’assurer la continuité du dispositif de soutien à la production d’électricité par des installations éoliennes terrestres, le Gouvernement a adopté un nouvel arrêté le 17 juin 2014 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent implantées à terre qui a été validé par la Commission européenne le 27 mars 2014. La Commission considère que ce dispositif est compatible avec les règes de l’Union en matière d’aides d’Etat.

Le nouvel arrêté apporte plusieurs modifications qu’il convient de relever :

  • Tout d’abord, contrairement à l’arrêté de 2008, l’arrêté tarifaire du 17 juin 2014 ne s’applique qu’aux éoliennes terrestres. L’éolien off-shore, étant soutenu par un dispositif d’appel d’offre, n’entre pas dans le champ d’application du nouvel arrêté contrairement au précédent.

  • Surtout, il est à noter que les caractéristiques principales de l’installation requises dans le contrat d’achat sont modifiées.

Ainsi, le nombre et la longueur des pales (ancien 3°), ainsi que la productivité moyenne annuelle estimée ne sont plus des éléments devant figurer dans le contrat conclu entre le producteur et l’acheteur légal.

Ces modifications peuvent avoir une importance pratique, car elles conduisent à ne plus voir ces deux éléments comme des « caractéristiques essentielles » de l’installation : c’est dire qu’ils peuvent en principe être modifiés sans que cela n’influe sur l’éligibilité à l’obligation d’achat ni sur une éventuelle remise en cause du tarif une fois la demande de contrat déposée (voire le contrat conclu).

On peut y voir là une forme de simplification car en pratique, la longueur des pâles peut varier selon les modèles d’éoliennes. Or, il n’est pas rare de voir le modèle pressenti lors du dépôt des demandes d’autorisation administrative, et même au stade de la demande de contrat à l’acheteur légal ne plus être disponible sur le marché lors de la commande du matériel… qui intervient plusieurs mois à plusieurs années après compte tenu des éventuels recours, des déblocages de fond et des délais de raccordement. On peut espérer à cet égard que cela assouplira les contraintes administratives sur les opérateurs.

Elément fondamental pour les producteurs en attente de contrat, il est prévu que ceux ayant déposé une demande de contrat d’achat entre le 27 juillet 2006 et la date d’entrée en vigueur du nouvel arrêté tarifaire (soit le 2 juillet 2014) pour les installations n’ayant pas fait l’objet de la conclusion d’un contrat d’obligation d’achat, peuvent bénéficier d’un contrat sur la base du nouvel arrêté sans avoir à déposer formellement une nouvelle demande sur la base de ce nouvel arrêté.

Il est important de noter que par une délibération du 28 mai 2014 la Commission de régulation de l’énergie (CRE) avait rendu un avis défavorable sur le projet d’arrêté. Elle y renouvelle les recommandations qu’elle avait émises dans un rapport sur les coûts de la rentabilité des énergies renouvelables de 2008 et appelle à modifier l’arrêté afin de :

–        « Revoir la structure du tarif afin d’éviter la rentabilité excessive des installations bénéficiant des meilleures conditions de vent ;

–        Adapter la durée des contrats d’obligation d’achat à la durée de vie des installations ;

–        Modifier régulièrement le tarif afin de tenir compte des évolutions de coût de la filière ».

D’autres points importants des conditions réglementaires de l’obligation d’achat demeurent identiques. Ainsi, les conditions tarifaires, y compris les conditions d’indexation, ne sont pas modifiées. Les indices du coût du travail ICHTTS1 et des prix à la production PPEI, n’étant plus publiés par l’INSEE, sont remplacés par l’indice révisé ICHTrev-TS et l’indice FM0ABE0000.

De même, les délais de mise en service et la durée du contrat d’achat ne sont pas modifiés. Le contrat d’achat est toujours conclu pour une durée de quinze ans à compter de la mise en service de l’installation. Cette mise en service doit avoir lieu dans un délai de trois ans à compter de la demande complète de contrat d’achat par le producteur et en cas de dépassement de ce délai, la durée du contrat d’achat est réduite.

 Contrairement à la tendance réglementaire actuelle qui prévoit une prolongation du délai de validité de l’arrêté ou de la déclaration ICPE pour les éoliennes (R553-10 Code de l’environnement), assortie le cas échéant d’une prorogation de la durée de validité de l’enquête publique, et même d’une prorogation des permis de construire jusque 10 ans (article R421-21 Code de l’urbanisme) pour les éoliennes.

Il est regrettable que le Gouvernement n’ait pas été au bout de la logique puisque si des circonstances exogènes expliquent l’impossibilité de débuter la construction et a fortiori l’exploitation (et justifient à ce titre une prolongation des titres), ces mêmes circonstances empêcheront la plupart du temps la mise en service… or, la sanction du non respect du délai de trois ans après la demande de contrat d’achat a été maintenue par le nouvel arrêté tarifaire du 17 juin 2014. Il appartiendra alors toujours aux opérateurs de procéder tardivement, en phase aval du projet à la demande de contrat d’achat.

Outre qu’il est purgé de son vice, ce nouvel arrêté tarifaire apporte donc quelques assouplissements salutaires, mais le fond du mécanisme de soutien ne change pas. Des recours ont déjà été annoncés à son encontre mais le nombre de critiques et leur bien fondé s’épuise…

Stéphanie GANDET- avocat associé

Camille COLAS

Green Law Avocat