Consultation publique sur la révision des SDAGE et des PGRI pour la période 2016-2021

sondageDepuis le 19 décembre 2014, et jusqu’au 18 juin 2015, une consultation publique portant sur la révision des schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) et des plans de gestion des risques d’inondation (PGRI) est ouverte sur le site internet du Ministère de l’écologie (voir le lien ici).

Définition

Pour rappel, les SDAGE, créés par la loi sur l’eau du 3 janvier 1992, sont des instruments de planification qui fixent pour chaque bassin hydrographique les orientations fondamentales d’une gestion équilibrée de la ressource en eau dans l’intérêt général et dans le respect des principes de la directive cadre sur l’eau et de la loi sur l’eau, des objectifs environnementaux pour chaque masse d’eau (plans d’eau, tronçons de cours d’eau, estuaires, eaux côtières, eaux souterraines).

Ils sont élaborés et mis en œuvre par les comités de bassin, qui sont au nombre de six pour la France métropolitaine (Loire-Bretagne, Adour-Garonne, Rhône-Méditerranée-Corse, Seine-Normandie, Rhin-Meuse, Artois-Picardie).

L’article L. 212-2 du code de l’environnement prévoit que les SDAGE sont mis à jour tous les six ans : la première mise à jour a eu lieu en 2009, et la deuxième, portant sur la période 2016-2021, est actuellement en cours.

Une circulaire du 13 septembre 2012 (Circ. 13 sept. 2012, NOR : DEVL1228280C : BO min. Écologie n° 18/2012, 10 oct.) et une instruction du gouvernement du 22 avril 2014 (Instr. 22 avr. 2014, NOR : DEVL1406395J : BO min. Écologie n° 2014/8, 10 mai) précisent les modalités de consultation du public lors de cette mise à jour.

Les PGRI constituent quant à eux de nouveaux outils de gestion des risques inondation créés par la loi Grenelle 2 (C. envir., art. L. 566-7 et s.) afin de satisfaire aux exigences communautaires (articles 7 et 8 de la directive 2007/60/CE du 23 octobre 2007 relative à l’évaluation et à la gestion des risques d’inondation).
Ils fixent les objectifs en matière de gestion des risques d’inondation concernant le bassin ou groupement de bassins et les objectifs appropriés aux territoires soumis à un risque d’inondation. Ces objectifs sont déclinés au sein de stratégies locales pour les territoires à risque d’inondation important et doivent permettre d’atteindre les objectifs de la stratégie nationale (C. envir., art. L. 566-7 et R. 566-10).

Elaborés par le préfet coordinateur de bassin, les PGRI doivent être approuvés avant le 22 décembre 2015, afin de respecter le délai imposé par la directive sur les inondations (C. envir., art. L. 566-7, L. 566-11 et R. 566-11).

Portée juridique

La portée juridique de ces deux types de documents est importante, puisqu’un certain nombre de décisions et de documents doivent être compatibles avec. Précisons à cet égard que le principe de compatibilité consiste dans une simple obligation de « non-contrariété », et non de conformité (voir par exemple : CE, 17 mars 2010, n° 311443 ; CE, 11 févr. 2011, n° 316727 ; CAA Nantes, 14 nov. 2014, n° 12NT01802 ; CAA Bordeaux, 31 déc. 2008, n° 07BX01364).

Ainsi, les SDAGE sont opposables aux programmes et décisions administratives dans le domaine de l’eau (et notamment aux autorisations et déclarations prises au titre de la nomenclature sur l’eau et de la nomenclature sur les installations classées), qui sont soumis à une obligation de compatibilité avec le SDAGE.

Une obligation de prise en compte de leurs orientations fondamentales existe également pour les décisions administratives prises au titre de législations distinctes de celle de l’eau, qui ne doivent pas, en principe, s’en écarter, sauf si un motif tiré de l’intérêt de l’opération envisagée le justifie (CE, 28 juill. 2004, n° 256511).

Cette obligation concerne:

– Les documents d’urbanisme (SCOT, PLU et cartes communales : voir par exemple : TA Lille, 5e ch., 19 avr. 2000, n° 98-552), qui ne doivent pas définir des options d’aménagement ou une destination des sols qui iraient à l’encontre ou compromettraient des éléments fondamentaux du SDAGE (Circ. 4 mai 2011, NOR : DEVL1108399C, ann. 4 : BO min. Écologie n° 2011/10, 10 juin) ;

– Les installations classées pour la protection de l’environnement (CAA Nantes, 28 juin 2002, n° 00NT00037 ; CAA Douai, 28 nov. 2002, n° 00DA01448 ; CAA Bordeaux, 30 déc. 2004, n° 00BX00133 ; TA Nantes, 3 mai 2005, n° 02620), quoique la jurisprudence soit plus incertaine depuis un arrêt du Conseil d’Etat qui semble faire prévaloir une interprétation restrictive en refusant d’annuler un arrêté d’autorisation par rapport aux dispositions d’un SDAGE concernant la qualité des eaux de surface, en estimant que celui-ci « ne s’imposait pas » à l’arrêté d’autorisation (CE, 14 oct. 2011, n° 323257).

– Le schéma régional des carrières (CAA Lyon, 1re ch., 11 mai 2010, n° 08LY02557) ;
Enfin, les SDAGE s’articulent avec les Schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE), qui sont le niveau local de la planification française de l’eau : d’après l’article L. 212-3 du code de l’environnement, les SAGE doivent en effet être compatibles avec les SDAGE.

Le PGRI doit également être compatible avec les objectifs des SDAGE, mais s’impose lui-même à un nombre important de décisions et de documents, tels que :
– les programmes et décisions rendues dans le domaine de l’eau ;
– les documents d’urbanisme (SCOT, PLU et cartes communales) ;
– les plans de prévention des risques naturels ;
– certains documents d’aménagement particulier ayant la valeur d’un document d’urbanisme : le schéma directeur de la région d’Ile-de-France et les schémas d’aménagement régionaux d’outre-mer.

Contentieux

Il résulte de ce qui précède que les SDAGE et les PPRI sont susceptibles de générer un abondant contentieux.

D’une part, les documents eux-mêmes peuvent faire l’objet de recours en annulation devant le juge administratif dans les deux mois suivant la publication de l’arrêté qui les approuve.

Parmi les moyens pouvant être invoqués figurent notamment ceux tirés de la méconnaissance des principes de participation et d’information du public.
Par ailleurs, tant les SDAGE que les PGRI sont conçus à partie d’un état des lieux réalisé dans chacun des bassins hydrographiques : il pourra dès lors être reproché au document d’avoir inexactement identifié les enjeux ou les contraintes de certaines zones, ce qui caractériserait une erreur d’appréciation de ses auteurs. Et il va de soi que plus la zone d’étude est vaste, plus le risque d’erreur est important.

Le défaut d’articulation avec d’autres documents de portée supérieure pourrait également être soulevé, de même que la méconnaissance des textes communautaires, qui, rappelons-le, jouent un rôle crucial en matière de gestion des risques d’inondation.

D’autre part, comme cela a été expliqué supra, une méconnaissance des dispositions ou tout au moins des orientations générales du SDAGE ou du PGRI pourra être invoquée à l’occasion de nombreux recours dirigés contre des décisions rendues en matière d’urbanisme ou d’environnement.

Il est donc essentiel pour tous les acteurs de l’eau et ceux qui gèrent ou subissent le risque d’inondation de suivre les consultations publiques en cours.

Maître Lou DELDIQUE (Green Law Avocat)