ENR : Un décret précise les modalités de contrôle et de sanction visant les installations de production d’électricité

Silvana ComugneroPar Jérémy TAUPIN et Stéphanie GANDET – GREEN LAW AVOCATS

Un décret du 14 décembre paru au Journal officiel du 16 décembre intéressera tous les producteurs d’électricité bénéficiant d’un contrat d’achat et ceux bénéficiant bientôt d’un contrat de complément de rémunération.

Le décret n°2016-1726, pris en application des articles L. 311-13-5, L. 311-14, L.314-7-1 et L. 314-25 du code de l’énergie, prévoit en effet les modalités de contrôle des installations de production d’électricité bénéficiant d’un contrat d’obligation d’achat ou de complément de rémunération, conclu en application d’un arrêté tarifaire ou à l’issue d’une procédure de mise en concurrence.

 

Ces contrôles peuvent prendre place :

  • lors de la mise en service des installations,
  • ou de manière périodique.

Le décret prévoit également les conséquences relatives à l’exécution du contrat en cas de non-conformité, et les éventuelles sanctions applicables.

Ce décret attendu par les professionnels du secteur (sa publication étant prévue depuis de longs mois) précise donc largement les modalités d’application de l’article L. 311-14 du code de l’énergie issu de la loi de transition énergétique pour la croissance verte.

 

1.      Objet du contrôle

Le contrôle des installations vise à assurer leur conformité aux prescriptions s’appliquant au producteur bénéficiant d’un soutien public.

Ce contrôle a semblé nécessaire, alors même que les textes organisant le soutien aux installations de production d’électricité conditionnent le bénéfice dudit soutien au respect de diverses prescriptions, notamment techniques ou environnementales. Certaines dérives ont pu être constatées chez certains producteurs. Cela n’occulte cependant pas le fait que dans l’immense majorité des cas, les producteurs ont subi des interprétations rétroactives de textes qu’ils pensaient respecter de bonne foi.

 Il n’existait avant le décret du 14 décembre 2016 commenté aucun dispositif sépcifique de contrôle des installations sous permettant de s’assurer du respect des prescriptions, sauf les obligations de laisser certains documents à disposition de la DREAL.

 

 

2.      Modalités et procédure de contrôle

Les contrôles prévus par le décret s’appliqueront

  • aux installations nouvelles, pour lesquelles la prise d’effet du contrat sera conditionnée à la fourniture d’une attestation de conformité délivrée par les organismes agréés,
  • ainsi qu’aux installations existantes, en cas de modification de l’installation ou de contrôle périodique, en encore de contrôle imposé par le ministre chargé de l’énergie ou le préfet de région.

 

Le décret définit également les conditions d’agrément des organismes chargés de réaliser les contrôles ainsi que les prescriptions générales relatives aux modalités d’organisation des contrôles dans les différents cas de figure.

 L’article R. 311-43 du code de l’énergie, introduit par l’article 2 du décret n°2016-1726, précise que les prescriptions générales sur le respect desquelles porte le contrôle seront définies par un arrêté du ministre chargé de l’énergie.

De même, aux prescriptions générales définies par le ministre chargé de l’énergie peuvent s’ajouter des prescriptions ne s’appliquant qu’à certaines installations. Ces prescriptions particulières et les modalités du contrôle de leur respect sont définies, le cas échéant, par les arrêtés interministériels propres à chacune des filières.

 

L’article 3 du décret précise les conditions dans lesquelles les installations ayant bénéficié de dispositions transitoires, conditionnant, jusqu’au 1er janvier 2018 l’entrée en vigueur du contrat à la fourniture d’une attestation sur l’honneur du producteur, au lieu d’une attestation de conformité, font réaliser un contrôle de leur installation par un organisme agréé. La date avant laquelle ces contrôles doivent être réalisés est fixée entre le 31 décembre 2018 et le 31 décembre 2019, selon la date de demande du contrat.

 

3.      Conséquence pour l’installation en cas de non-conformité

 L’article 2 du décret prévoit précise les sanctions administratives encourues lorsqu’un manquement est constaté ou lorsque le Préfet est informé de la non-conformité d’une installation par un organisme agréé. Ces sanctions sont principalement la suspension, puis la résiliation du contrat d’obligation d’achat ou de complément de rémunération.

 

Tout d’abord, le Préfet peut mettre en demeure le producteur, après manquement constaté suite à un contrôle, de respecter les obligations découlant de son contrat.

 

Passé le délai imparti au producteur pour présenter ses observations et au regard des éléments transmis, le préfet de région peut demander au producteur des éléments complémentaires et, le cas échéant, fixer un nouveau délai pour qu’ils lui soient transmis. Une fois expirés le ou les délais ainsi impartis au producteur, le préfet peut :

 – soit abandonner la procédure et demander, le cas échéant, au producteur de déposer une demande de modification de son contrat ;

– soit poursuivre la procédure. Dans ce cas, il enjoint au cocontractant de suspendre le contrat ainsi que le versement des sommes mentionnées à l’article R. 311-29, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception dont il transmet une copie à la Commission de régulation de l’énergie. Il en informe le producteur par la même voie. A la réception de la demande du préfet, le cocontractant met en œuvre les mesures nécessaires à la suspension du contrat ;

– soit prononcer une sanction pécuniaire à l’encontre du producteur.

 

La suspension du contrat est sans effet sur le terme qu’il a initialement fixé.

Suite à la suspension du contrat, deux situations peuvent alors se présenter.

En effet, dès l’achèvement des mesures prises pour régulariser la situation de l’installation dans le délai imparti, le producteur en fait part au préfet de région, qui peut demander à un agent mentionné aux articles L. 142-22 à L. 142-29 de vérifier la réalisation effective de ces mesures dans un délai maximum de quinze jours ouvrés à compter de la notification par le producteur. A l’issue du délai imparti pour la vérification effective des mesures, le préfet indique au producteur par courrier si les mesures qu’il a prises permettent de régulariser la situation de son installation.

 Si les mesures prises permettent de régulariser la situation de l’installation, le préfet de région enjoint sans délai au co-contractant, par courrier avec accusé de réception, de lever la suspension du contrat.

 

Si le producteur n’a pas fait part au préfet de région des mesures prises pour régulariser sa situation dans le délai qui lui a été imparti par la mise en demeure, le préfet enjoint au co-contractant par lettre recommandée avec avis de réception de résilier le contrat, et en informe le producteur par la même voie. La résiliation prend effet à la date de réception par le co-contractant de la notification par le préfet (nouvel article R. 311-32 introduit par le décret n°2016-1726).

 En cas de résiliation du contrat, le producteur rembourse le co-contractant, et le cas échéant l’acheteur de dernier recours mentionné à l’article L. 314-26, de toutes les sommes qu’il a perçues au titre de son contrat depuis la date du début du manquement ou de la non-conformité ou à défaut depuis la date de son constat jusqu’à la résiliation du contrat, diminuées le cas échéant des sommes versées en application de l’article R. 314-49 et des cahiers des charges des appels d’offres mentionnés à l’article L. 311-10. Le décret prévoit que ces sommes sont égales :

«  – pour un contrat de complément de rémunération conclu en application du 2° de l’article L. 311-12 ou de l’article L. 314-18, aux sommes actualisées perçues et versées au titre du complément de rémunération ;

 – pour un contrat d’achat conclu en application du 1° de l’article L. 311-12, de l’article L. 314-1 ou de l’article L. 314-26, aux sommes actualisées perçues et versées au titre de l’obligation d’achat dans la limite des surcoûts mentionnés au 1° de l’article L. 121-7 en résultant. »

Les producteurs devront veiller à correctement anticiper ces contrôles en se ménageant d’ores et déjà le preuves de la conformité en sus des attestations.

Compte tenu de la gravité potentielle des conséquences encourues et des délais de jugement contre les décisions qu’ils estiment mal fondées, il est dans l’intérêt des producteurs en effet de constituer un dossier solide, cohérent et ce le plus en amont possible.

Les décisions du Préfet comme de l’acheteur légal sont des actes attaquables, même si aucune voie ou délai de recours n’est mentionné. La prudence demeure de mise compte tenu des dernières interprétations de jurisprudences qui sont faites actuellement dans les litiges de contentieux administratif.