Urbanisme: dans quelles conditions l’ouverture à l’urbanisation des zones AU peut passer par une simple modification ? (TA Grenoble 21 novembre 2017, n°1506671)

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Par Maître Lou DELDIQUE, Avocat of counsel – GREEN LAW AVOCATS (lou.deldique@green-law-avocat.fr)

Par un jugement en date du 21 novembre 2017 (TA Grenoble 21 novembre 2017 : jugement TAGrenoble 1506671), le Tribunal administratif de Grenoble considéré que l’ouverture à l’urbanisation d’une zone à urbaniser (AU) pouvait être réalisée par simple modification du Plan Local d’Urbanisme (PLU), même si la zone présente un caractère naturel.

Rappelons que les zones AU sont des secteurs destinés à être ouverts à l’urbanisation (et donc à être reclassés en zone U) à plus ou moins long terme par les auteurs du PLU. L’article R.151-20 du code de l’urbanisme distingue deux hypothèses :

  • La zone est immédiatement constructible lorsque sa desserte par les voies et les réseaux est suffisante et si les orientations d’aménagement et de programmation et le règlement ont défini les conditions d’aménagement et d’équipement de la zone ;
  • Lorsque les voies et les réseaux existants sont insuffisants, la constructibilité de la zone est subordonnée à une modification ou à une révision du PLU.

 

En l’espèce, le conseil municipal de Chambéry avait autorisé l’urbanisation d’une zone AU à l’issue d’une procédure de modification.

Cette décision avait été contestée par des particuliers, qui soutenaient qu’une révision aurait dû être organisée, dans la mesure où l’ouverture de la zone à l’urbanisation avait pour effet de réduire une zone naturelle.

En effet, les articles L. 153-31 et suivants du code de l’urbanisme (anciens articles L. 123-13 et suivants) prévoient que la procédure de modification ne peut être mise en œuvre que si la révision (qui est une procédure plus lourde et plus contraignante) n’est pas requise.

Or la révision est obligatoire lorsqu’il est envisagé de :

  • Changer les orientations définies par le projet d’aménagement et de développement durables ;
  • Réduire un espace boisé classé, une zone agricole ou une zone naturelle et forestière ;
  • Réduire une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels, ou d’une évolution de nature à induire de graves risques de nuisance.Le Tribunal a toutefois considéré que ce n’était pas la décision d’ouverture de la zone à l’urbanisation qui avait eu pour effet de réduire un espace naturel, mais son classement en zone AU. Dans ces conditions, aucune révision n’était requise :  

Le Tribunal a toutefois considéré que ce n’était pas la décision d’ouverture de la zone à l’urbanisation qui avait eu pour effet de réduire un espace naturel, mais son classement en zone AU. Dans ces conditions, aucune révision n’était requise :

 « Considérant que l’article R. 123-4 du code de l’urbanisme, alors en vigueur, disposait que « le règlement délimite les zones urbaines, les zones à urbaniser, les zones agricoles et les zones naturelles et forestières » ; que l’article R. 123-6 définissait les zones à urbaniser AU comme celles destinées à être ouvertes à l’urbanisation qui, soit pouvaient être constructibles immédiatement sous conditions, soit devenir constructibles à l’occasion d’une révision ou d’une modification ; que les articles R. 123-7 et R. 123-8 définissaient respectivement les zones agricoles A et les zones naturelles et forestières N ; que la zone en litige étant précédemment classée AU, la modification n’a pas pour effet d’ouvrir à l’urbanisation une zone agricole, naturelle ou forestière ; que, par ailleurs, la circonstance que la zone jouxte un espace boisé classé n’a pas pour effet de réduire cet espace ; qu’en conséquence, le recours à une procédure de révision n’était pas nécessaire ; »

 

Il s’infère de cette décision que ce ne sont pas les caractéristiques physiques de la zone qui doivent être prises en compte pour l’application des dispositions des articles L. 153-31 et suivants du code de l’urbanisme, mais son classement par le PLU qui en lui même était déjà un classement AU.

« Considérant que l’article R. 123-4 du code de l’urbanisme, alors en vigueur, disposait que « le règlement délimite les zones urbaines, les zones à urbaniser, les zones agricoles et les zones naturelles et forestières » ; que l’article R. 123-6 définissait les zones à urbaniser AU comme celles destinées à être ouvertes à l’urbanisation qui, soit pouvaient être constructibles immédiatement sous conditions, soit devenir constructibles à l’occasion d’une révision ou d’une modification ; que les articles R. 123-7 et R. 123-8 définissaient respectivement les zones agricoles A et les zones naturelles et forestières N ; que la zone en litige étant précédemment classée AU, la modification n’a pas pour effet d’ouvrir à l’urbanisation une zone agricole, naturelle ou forestière ; que, par ailleurs, la circonstance que la zone jouxte un espace boisé classé n’a pas pour effet de réduire cet espace ; qu’en conséquence, le recours à une procédure de révision n’était pas nécessaire ; »

 

Précisons toutefois que la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a ajouté un nouveau paramètre, puisqu’elle a modifié l’article L. 153-31 du Code de l’urbanisme de manière à rendre la procédure de révision obligatoire lorsqu’il est envisagé d’ouvrir à l’urbanisation une zone AU qui, dans les neuf ans suivant sa création, n’a pas été ouverte à l’urbanisation ou n’a pas fait l’objet d’acquisitions foncières significatives de la part de la commune ou de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent.