Dans une décision du 30 septembre 2011, le CoRDIS (comité de réglement des différents et des sanctions, placé auprès de la Commission de régulation de l’Energie), a décidé que la société ERDF avait méconnu ses obligations et la documentation technique de référence en ne transmettant pas au demandeur la Proposition Technique et Financière dans le délai de trois mois.  

Une décision importante pour la filière photovoltaïque, indépendamment du décret du 09 décembre 2010

   Cette décision est  remarquable à un double point de vue:  

  • Premièrement, le CoRDIS ne prononce indépendamment de la légalité du décret du 09 décembre 2010 qui a suspendu l’obligation d’achat en matière photovoltaïque (et qui donnera lieu dans les jours qui viennent à un arrêt du Conseil d’Etat).   

   Ainsi, dans un cas, le décret n’avait rien à voir avec la queston posée d’abord, et dans l’autre cas ensuite, malgré le sursis à statuer décidé par le Comité, ce dernier décide toutefois de trancher la question relative au respect par ERDF de ses obligation.  

  • Secondement, la reconnaissance de cette méconnaissance (qui revêtera indéniablement la qualification de « faute » devant les juridictions saisies de recours indemnitaires) a été longtemps attendue par les opérateurs lésés par ERDF! On le sait: l’intervention brutale du décret s’est accompagnée d’une inégalité entre les opérateurs, distinguant ceux ayant pu accepter la PTF à temps car ils l’avaient reçu dans les délais impartis, de ceux n’ayant pas pu le faire en raison de retards de transmission par le gestionnaire de réseau.   

   Ainsi, peu importe que le décret soit reconnu comme illégal ou non, les producteurs voient le non respect du délai de trois mois reconnu par le CoRDIS…   

Une décision novatrice mais non un revirement

   On se gardera de penser trop hâtivement qu’il s’agit là d’un « revirement » (il est permis de douter qu’il y ait une « jurisprudence du CoRDIS, qui est une AAI…). En effet, beaucoup penseront certainement que la décision « GAEC DE SAINT DOUE c/ERDF » revient sur la décision « VOL V SOLAR c/ERDF » rendue le 22 juin 2011. Or, à y rgerader de plus près, on remarque que le CoRDIS n’avait pas dit qu’aucune faute n’avait été commise… se limitant à considérer, de façon fondée ou non là n’est pas le problème, que l’obligation de transmission dans un délai de trois n’était pas une obligation de résultat. Et il l’avait fait en réponse à la question de savoir si le non respect du délai de trois créait implicitement une PTF. E t à cette question précise, intéressante d’un point de vue juridique, le CoRDIS a répondu non.  

   Ainsi, il ne s’était pas prononcé sur la question de savoir si ERDF méconnaissait ses obligations et sa documentation technique de référence en ne respectant pas le délai de trois mois pourtant prévu dans la documentation technique.  

   C’est chose faite dorénavant.   

La reconnaissance d’un comportement délibéré d’ERDF

   La décision « GAEC DE SAINT DOUE » se distingue encore davantage : elle souligne le comportement délibéré d’ERDF qui a volontairement omis de transmettre la PTF en considération de l’intervention annoncée du décret du 09 décembre 2010:  

   « Il ressort des pièces du dossier que la proposition technique et financière n’a pas été notifiée dans le délai de trois mois par la société ERDF […] ce qui constitue une méconnaissance par la société ERDF de sa documentation technique de référence qui prévoit sa transmission dans un délai qui n’excédera pas trois mois. Qui plus est, la société ERDF reconnaît que la proposition technique et financière n’a pas été envoyée à […] en raison de l’entrée en vigueur du décret du 09 décembre 2010 en suspendant l’obligation d’achat de l’électricité produite par certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil. Or la publication du décret du 09 décembre 2010 n’est intervenue que le 10 décembre 2010 et, jusqu’à cette date, la société ERDF n’était pas en droit de retarder l’envoi de la proposition technique et financière. A ce double titre, le […] est fondé à invoquer la méconnaissance par la société ERDF de ses obligations et de sa documentation technique de référence« .   

   Certes, ERDF pourrait encore décider de contester la décision devant la Cour d’appel de Paris… mais même dans cette hypothèse désespérée, reste que la décision du CoRDIS demeurera valable.  

   Nul doute qu’elle présentera un intérêt majeur dans le cadre des recours en responsabilité que les producteurs lésés envisageraient.   

Stéphanie Gandet  

Avocat au Barreau de Lille

Green Law Avocat

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